Prévenir les expulsions locatives, préserver la santé mentale
Depuis 2019, un soutien psychologique est proposé aux personnes en procédure d’expulsion ou vivant dans un logement très dégradé deux fois par semaine, chaque mardi et jeudi, à l’Espace Solidarité Habitat (ESH), à Paris. Une initiative qui est née d’un triple constat : Sur près de 1 500 ménages accompagnés chaque année, près de la moitié est en situation de fragilité et de précarité et l’ensemble de notre public est soumis à une procédure longue qui fragilise et peut altérer l’équilibre psychologique. « Deuxièmement, les professionnels qui les accompagnent sur les plans social et juridique n’ont ni la formation ni les leviers pour répondre à la souffrance psychique qui les bloque très souvent dans toutes leurs démarches. Enfin, très peu de dispositifs de droit commun sont adaptés à répondre à ces problématiques et les délais d’attente sont de plusieurs mois. Quant au secteur libéral, il est inaccessible financièrement. Seules quelques rares associations, telle que « Soutien Insertion Santé » proposent un accompagnement social et psychologique aux personnes en difficulté en Ile-de-France », explique Nicolas Phan Van Phi, chargé de mission « prévention des expulsions » à l’ESH.
Aujourd’hui, le suivi psychologique individuel et gratuit, mis en place par l’ESH sur la base du volontariat, vient en aide à une trentaine de ménages et en 2020, une formation collective mensuelle réservée à l’équipe salariée est venue compléter ce soutien dédié à la santé mentale afin de mieux gérer les situations les plus délicates. « L’objectif du suivi individuel et de la formation collective, c’est d’arriver à former un trinôme entre le salarié, la personne en difficulté et la psychologue pour éviter les blocages et permettre d’aboutir à des solutions adaptées aux personnes afin de retarder la procédure et mieux encore, la suspendre. En septembre 2021, nous avons également ouvert des groupes de parole mensuels pour les ménages afin de rompre l’isolement social dans lequel certains peuvent se trouver. Cela permet de ne pas vivre la procédure tout seul, de se rendre compte que d’autres vivent la même chose », ajoute Nicolas.
Phénomènes méconnus et peu pris en considération, les « troubles doux » liés à la procédure d’expulsion passent malheureusement trop souvent sous les radars de la Justice. Première étape de plaidoyer pour l’ESH : mettre en avant le lien direct qui existe entre maintien dans le logement et santé mentale. « On a bien réussi à le faire en ce qui concerne l’accès au logement avec le « Logement d’abord », il faut désormais le faire pour le maintien dans le logement. »