« Ici, on sort de la rue » : les accueils de jour aujourd'hui.
Du 13 au 20 octobre, la Fondation Abbé Pierre, la FNARS et les associations de lutte contre les exclusions, organisaient une semaine nationale des solidarités.
Parfois rejetés, bien souvent méconnus, les accueils de jour ont souhaité se mobiliser sur tous les territoires pour changer les représentations du grand public sur la grande exclusion et se rendre visible pendant une semaine autour d’une date symbolique : le 17 octobre, journée mondiale du refus de la misère.
De Lille à Marseille, de Brest à Strasbourg, une centaine de structures ont ouvert leurs portes au grand public. Riverains, élus, partenaires, passants ou simples curieux étaient invités à venir découvrir « des lieux de vie, où le lien et le rire se côtoient malgré des vécus lourds ».
Point d’orgue de cette semaine de mobilisation, un colloque national réunissant près de 450 personnes venues de toute la France pour échanger sur les difficultés, les bonnes pratiques, les enjeux auxquels sont confrontés ces lieux. Mais il s’agissait surtout de les rendre visibles et d’’interpeller les pouvoirs publics sur le caractère indispensable de ces espaces de vie.
Des missions essentielles
« C’est un endroit où s’abriter », « il y a un canapé, on peut se reposer », « pour prendre un café chaud », « pour rencontrer des gens », « pour connaître ses droits et faire des démarches » : partout dans les accueils de jour, les équipes tentent de répondre aux besoins de première nécessité des personnes très fragilisées et en situation d’exclusion.
Pouvoir se poser, se restaurer, prendre une douche, laver son linge, tisser des liens, bénéficier d'une écoute, accéder à ses droits, recevoir son courrier… des besoins vitaux lorsqu’on vit dans des conditions précaires. Au-delà, en proposant des activités sportives et culturelles tout au long de l’année ou des séjours ponctuels, les accueils de jour invitent à se mettre en mouvement, à renouer des relations à soi et aux autres, à reprendre confiance.
« Quand je vais à l’accueil de jour, j’entre dans une famille, je suis comme chez moi. Dans la rue, toutes les portes sont fermées, il n’y pas d’issue pour toi. Une fois la porte de l’accueil passée, tu sens déjà un apaisement. Tu sais que quelqu’un va t’aider » explique N’Dri, personne accueillie.
Ces lieux « d’accueil, d’écoute et d’orientation » – et de plus en plus d’accompagnement – assurent au quotidien un soutien inconditionnel aux personnes en situation de grande précarité, sans abri ou mal logées. Des missions essentielles difficiles à tenir face à l’augmentation des publics.
Un enjeu de taille qui questionne et a des conséquences sur le temps de l’accueil, de la rencontre qui peut être long avant que le lien de confiance s’établisse, avant de pouvoir initier des changements. « Quand il y a trop de monde, on n’est pas en capacité de prendre le temps, d’avoir un vrai partage, un vrai échange ; alors on travaille différemment, autour d’un café, en jouant aux cartes, en faisant une sortie culturelle », confie un salarié. Ces réflexions rejoignent les discussions autour de la participation des personnes accueillies : comment associer les personnes à la vie de l’accueil de jour, comment travailler avec elles, notamment sur la citoyenneté ?
Plaidoyer pour des villes solidaires
À l’heure où se répandent dans les villes un mobilier urbain hostile, des arrêtés anti-mendicité, des réductions de subventions aux associations, la Fondation Abbé Pierre et la FNARS ont souhaité interpeller les acteurs publics et politiques sur les dysfonctionnements de certains dispositifs.
Avec l’ensemble des associations du secteur, elles souhaitent que les Communes s’engagent comme « villes solidaires » à respecter et faire vivre les valeurs d’accueil et de solidarité auprès des plus exclus. Au-delà, il s’agit de faire respecter la loi notamment en ce qui concerne, la domiciliation – pouvoir bénéficier d’une adresse postale qui permet à toute personne sans domicile personnel ou stable d’accéder à ses droits.
« Avoir une domiciliation, c’est le premier combat quand on vit à la rue. Sans domiciliation, on n’existe pas. Ce n’est pas juste une adresse, c’est être reconnu, c’est un droit fondamental pour exister ! » s’exclame une personne qui a fréquenté des accueils de jour.